Une notice biographique sur Yannick Bruxelle, rédigée par Dominique Bachelart professeure honoraire de l’université François Rabelais de Tours, nous permet rendre visible le parcours de Yannick et de situer ce travail dans une dynamique tout à fait d’actualité au regard de l’évolution des pratiques éducatives.

Des Causeries c’est quoi?

L’idée de causerie a été chantée par Gilles Vigneault au Canada et plus précisément au Québec :
« Les gens de mon pays / Ce sont gens de paroles / Et gens de causerie / Qui parlent pour s’entendre ».

Une autre définition de ce côté-ci de l’Atlantique nous est proposée : exposé oral sur un ton de familiarité et de simplicité.
C’est dans cet esprit que nous entendons nous retrouver pendant les temps de discussion des Causeries Yannick Bruxelle.
Familiarité et simplicité qui n’excluent point la profondeur des idées et des propos.

Passer de la terre à la Terre et réciproquement


Avoir les pieds dedans tout en portant le regard à l’horizon est une question fondamentale pour l’éducation à l’environnement. La classe dehors ne relève pas du simple fait de déplacer l’organisation du dedans dans un autre milieu aussi naturel soit-il, elle nécessite une pédagogie active, de projet. Retrouver sa juste place dans le tissu du vivant, humain et non humain, d’ici et d’ailleurs fait sans doute appel à des savoirs et une bonne connaissance des fondamentaux encyclopédiques mais aussi et peut être surtout à une intelligence du cœur qui est sans aucun doute en nous avant la raison.

Dans l’approche éducative, entre cœur et raison pourquoi faudrait-il choisir ?
De l’établissement de ma commune au réchauffement climatique global, est ce si simple de s’en emparer ? Et à plusieurs ?
Réfléchir sur ses pratiques, pourquoi faire ? À quoi bon ?
Mais en fait pourquoi être autant terre à Terre ?

Le territoire élément clé de la classe dehors


De nombreuses personnes dans les territoires sont inquiètes de voir toujours s’élargir et se creuser le fossé entre nous les humains et la nature, comme elles sont inquiètes de voir les enfants trop enfermés et soumis aux écrans. Permettre aux enfants de vivre des expériences de nature devient un enjeux pour de nombreux parents, pour des acteurs de l’éducation, pour des associations, des collectivités… et même pour des entreprises. Autant d’acteurs prêts à se mobiliser, prêts à apporter leurs contributions. Faire du territoire un lieu accueillant pour les expériences de nature suppose une implication de nombreux habitant.es et met le sujet de l’éducation sur la table des discussions avec au centre le principe de proximité qui progressivement à la mesure de la dégradation de la planète s’impose à nous.

Un maire dit à une directrice d’école nouvellement nommée dans la commune et qui vient se présenter :  » ici madame on fait classe dehors ». Qu’est-ce que cela suggère ?
Les collectivités locales ne sont-elles pas le premier levier sur lequel nous devrions agir pour développer la pratique de la classe dehors dans les territoires ?
Puisqu’il n’y a pas de démocratie sans contre pouvoir et que l’État, depuis Paris, régente tout en ce qui concerne les contenus pédagogiques, ne devrions nous pas mettre sur pieds des – commissions éducation territoriales – à l’échelle des communautés de communes afin de permettre aux citoyennes et citoyens de jouer un rôle pour une éducation plus en phase avec le territoire ?

Un paysage qui a évolué, qui évolue 


Au cours du XXème siècle le paysage dans lequel les associations environnementales investies dans des actions d’éducation à l’environnement a changé. Ce changement s’est fait à bas bruit. 
 
La vision républicaine dans laquelle les individus devenaient des personnes reconnues dans leur singularité et leur « appartenance engageante » à un collectif produisant du bien commun, a peu à peu été remplacée par une vision néolibérale dans laquelle les individus, réduits au seul domaine du privé, sont entrepreneurs d’eux-mêmes (homo économicus – une multitude de Robinson Crusoé) au sein d’un marché dont les règles sont le fondement de notre communauté humaine. Vision qui suppose que la liberté des individus ne s’exerce qu’affranchie du secteur public.  
 
 
Impliquée dans le quotidien, l’éducation à l’environnement n’a évidemment pas échappé à ce changement de paysage. Dans ces conditions, l’acte éducatif doit-il se fonder sur des valeurs cardinales du néolibéralisme comme ; la concurrence avec l’autre, la recherche de son intérêt privé, la satisfaction immédiate des désirs, l’opportunisme, l’autoritarisme, … ? 

Si l’idée de contribuer à l’émergence d’une multitude de Robinson Crusoé est rejetée, quelles sont les valeurs cardinales sur lesquelles appuyer l’acte éducatif ? 

Et pour poursuivre, le changement de paysage décrit doit-il modifier la manière dont les associations conçoivent les partenariats institutionnels ?